Face à cela, nous avons pris une trajectoire nécessaire afin de puiser une réelle alternative défendant à la fois l’idée de Révolution et les libertés individuelles (comme collectives), ce qui n’était pas le cas de nombreux partis ou mouvements politiques. Avoir une ligne qui s’inscrivait dans un projet de rupture s’avérait nécessairement révolutionnaire.
Nous avons eu différentes devises témoignant d’un processus notamment celle de Jean Jaurès assassiné par l’extrême-droite : « Le courage, c’est de chercher la vérité ». Or, cela fait faisait clairement allusion à une figure du socialisme. Nous aurions pu choisir d’autres devises. Cependant, la construction mécanique de Révolution et Libertés s’oriente au travers d’un processus bien distinct : la « Grande guerre » est ses conséquences. Nombreuses auront été les révolutions : révolution irlandaise, révolution allemande, révolution russe, révolution ukrainienne (via la Makhnovtchina), le début de la révolution chinoise, etc.
L’élément apparaît comme un marqueur au cours de la France aura certainement été le quinquennat de François Hollande au travers d’une série d’attentats terroristes : Charlie Hebdo, Hypercasher de Vincennes, Montrouge, Nice, la nuit du 13 novembre 2015, auront chamboulé le paysage politique, mais aussi accru une vaste répression contre les libertés publiques au nom d’un adage lepéniste : « la sécurité est la première des libertés ». La phraséologie d’une guerre contre le terrorisme en disait long, mais en alliance avec la Turquie islamiste et djihadiste d’Erdogan.
Au travers d’une large évolution des mentalités, notre devise de Rosa Luxemburg à savoir « les guerres sont des phénomènes barbares » a permis de redécouvrir clairement objectivement la nature même de la guerre.
Dans le contexte de la Grande Guerre, les défilés patriotes exaltaient sciemment la haine, mais ce sont les sociaux-démocrates (avant l’union sacrée, il n’y avait de différences entre sociaux-démocrates et communistes) qui étaient visés. Ainsi, Rosa lance devant le président cette petite phrase : « Ou bien ai-je essayé d´exciter dans les masses venues m´écouter l´arrogance nationaliste, le chauvinisme, le mépris et la haine d´autres races et d´autres peuples ? ».
Dans le même temps, « toutes nos idées s´harmonisent en une conception du monde cohérente, scientifiquement fondée », confirmera-t-elle devant le juge.
Croyant nécessaire de reprendre le discours, il semble nécessaire d’en sortir d’autres éléments. Il semble nécessaire d’aller plus loin au travers de cette citation soutenant que « la majorité du peuple aboutit à la conviction que les guerres sont un phénomène barbare, profondément immoral, réactionnaire et contraire aux intérêts du peuple ».
La réalité de la guerre s’enracine dans « le fondement de la puissance de l´État et du militarisme, c´est l´obéissance passive, l´obéissance absolue du soldat ».
Pourtant, il convient de souligner qu’encore aujourd’hui dans une actualité bouillante, notamment sur la guerre en Ukraine, l’intérêt des Ukrainiens comme des Russes reste d’en terminer rapidement de cette guerre « barbare ». D’autres ont eu lieu, le sang de civils innocents coule ou des militaires embrigadés par la propagande nationaliste voir même enrôlé de force laisse une vision abjecte.
Certains pensent peut-être que nous sommes dans l’aspect moralisateur, d’autres que nous sommes dans des incantations de nature mystique. Toujours devant le tribunal de Francfort, Rosa Luxemburg lance que « les guerres sont un phénomène condamnable et contraire aux intérêts du peuple ». La réalité, ce ne sont pas les industriels qui vont au combat s’entre-tuer, ce sont des ouvriers et des paysans.
Rappelons également que les dissidents de l’empire allemand étaient soit incarcérés soit jetés à une foule biberonnée avec un discours patriotique ne comprenant pas vraiment ce qu’il se passait. En effet, il ne s’agit point d’être moralisateur au travers d’un discours s’orientant sur le fait que « la guerre, c’est mal ». Mais bien de dépasser le cap d’une analyse objective : le patriotisme, le chauvinisme et les intérêts de la bourgeoisie permettent d’aller plus loin sur le terrain au travers de ce que disait déjà Rosa Luxemburg dans la crise de social-démocratie ou connu sur le nom de la brochure de Junius : « Finie l’ivresse. Fini le vacarme patriotique dans les rues » avant de poursuivre dans ces termes : « Les affaires fructifient sur des ruines. Des villes se métamorphosent en monceaux de décombres, des villages en cimetières, des régions entières en déserts, des populations entières en troupes de mendiants, des églises en écuries ».
Le long chapitre de « socialisme ou barbarie » devenu nécessaire pour la compréhension du monde se targue de soutenir que « souillée, déshonorée, pataugeant dans le sang, couverte de crasse ; voilà comment se présente la société bourgeoise, voilà ce qu’elle est ».
De plus, Rosa Luxemburg fera un constat clair en affirmant qu’au « cœur de ce sabbat de sorcière s’est produit une catastrophe de portée mondiale : la capitulation de la social-démocratie internationale ». Oui, faire une référence à l’aspiration de la « barbarie » comme vision de la guerre, mais aussi des éléments que repose l’idée que l’absence de socialisme conduise vers les pires horreurs. Elle ajoute que « dans la guerre mondiale actuelle, le prolétariat est tombé plus bas que jamais. C’est là un malheur pour toute l’humanité ».
Une des notions tend tout de même de réfléchir sur cette approche : « Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l’avenir de la civilisation et de l’humanité en dépendent ». Avant de rajouter que « Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l’avenir de la civilisation et de l’humanité en dépendent ».
La réalité repose sur l’organisation méthodique des meurtres de masse par les dirigeants comme le dénonce Rosa Luxemburg : « La guerre est un meurtre méthodique, organisé, gigantesque ». Voilà une réalité bien troublante en ces périodes de guerre en Europe. Mais, il faut poursuivre quelques lignes plus loin pour comprendre ce que la bourgeoisie attend finalement du prolétariat que « pour la première fois dans le mouvement ouvrier moderne, il y a une coupure entre les impératifs de la solidarité internationale des prolétaires et les intérêts de liberté et d’existence nationale des peuples, pour la première fois nous découvrons que l’indépendance et la liberté des nations exigent impérieusement que les prolétaires de pays différents se massacrent et s’exterminent les uns les autres ». Ensuite,, il convient de poursuivre la lecture pour mieux comprendre la réalité qui anime les courants sociaux-démocrates de l’époque que « jusqu’à présent, nous vivions avec la conviction que les intérêts des nations et les intérêts de classe du prolétariat concordaient harmonieusement, qu’ils étaient identiques, qu’on ne pouvait en aucun cas les opposer. C’était la base de notre théorie et de notre pratique, l’esprit qui animait notre agitation parmi les masses populaires ».
De plus, il convient d’affirmer que « les dirigeants de la social-démocratie soutenaient le point de vue suivant : les intérêts vitaux de la nation et les intérêts de classe du prolétariat international ne font qu’un, et tous les deux sont opposés à la guerre ». Or, la théorie et la pratique n’ont pas fonctionné. Les réformistes se sont engagés dans un combat contre les nations, contre les peuples et contre le prolétariat.
C’est ce que poursuivra Rosa Luxemburg en soutenant que « l’autre aspect de l’attitude de la social-démocratie était l’acceptation officielle de l’Union sacrée, c’est-à-dire la suspension de la lutte de classes pour la durée de la guerre ». Il faut comprendre naturellement qu’on « sait bien que la lutte de classes n’est nullement une invention, une création délibérée de la social-démocratie que celle-ci pourrait à son gré et de sa propre initiative supprimer pendant certaines périodes ».
À partir de cela, on comprends mieux le sens de notre devise, de l’intention que nous lui portons effectivement une lourde responsabilité à combattre toutes les guerres. On pourrait continuer de poursuivre sereinement notre argumentation au travers de l’inébranlable lecture de la brochure de Junius.
Pourtant, il semble nécessaire d’affirmer qu’au travers de ce qu’il se passe en Ukraine avec une réelle guerre technologique se mettant en place, l’affirmation pour les antimilitaristes que « les guerres sont des phénomènes barbares » permet de comprendre une réalité bien abstraite, ce n’est pas la guerre en Ukraine qu’il faut stopper, mais l’ensemble de toutes les guerres, tous les conflits et un désarmement global en passant en premier lieu sur la question du nucléaire militaire. Ainsi, dire que les « guerres sont des phénomènes barbares » ne réside pas dans une incantation mystique, mais bien dans une analyse rigoureuse et matérialiste. La constance de Rosa Luxemburg permet de soutenir une vision a priori révolutionnaire dans un monde précis.
Enfin, il devient évident et cohérent d’affirmer que les écrits, dont nous parlerons prochainement des lettres écrites en prison. Elles soulèvent un amertume de fond.